Bébé est là, moi j'veux m'enfuir : le baby-blues dans toute sa splendeur
Quand j'étais enceinte, j'ai entendu parler d'une période bizarre après l'accouchement, faite de hauts et de bas constants. Une période de dépression joliment appelée le blues du bébé. Je savais que ça arrivait souvent mais je n'imaginais pas à quel point cela serait difficile pour moi.
J'ai vécu 9 mois de grossesse plutôt cools. Je n'ai pas été malade, je n'ai pas eu de souci particulier. J'étais une jeune "presque-maman" en pleine forme. J'étais super heureuse de devenir maman. Je m'imaginais radieuse, donnant le biberon en caressant les cheveux de mon p'tit bonhomme et me baladant avec la super poussette dernier cri que nous avions acheté.
Bébé est là, moi j'suis perdue !
L'accouchement a été long (16 heures soit presque 10% d'une semaine..j'ai calculé) mais j'en garde un très bon souvenir parceque l'équipe a été géniale. Quand j'ai entendu "Félicitations Madame" et qu'on m'a posé mon fils sur le coeur, j'ai pleuré, j'ai souri, j'étais heureuse. J'étais aussi super fatiguée et après cette journée marathon, je n'avais qu'une envie obsessionnelle : Dormir ! C'était le soir et malheureusement, je n'ai pas pu me reposer pendant les heures qui ont suivi. Le papa est rentré à la maison et moi je suis restée avec ce mini-moi qui hurlait dans son berceau, dans cette chambre toute tristoune de la maternité.
J'ai essayé de calmer ce mini-moi que je devais maintenant apprivoiser. On ne vous donne aucun mode d'emploi quand vous devenez maman. Ca s'apprend sur le tas et là, pour l'heure, j'étais totalement perdue. J'ai paniqué, j'ai appuyé sur le petit bouton rouge "Alerte secours" au dessus de mon lit. L'infirmière m'a dit : "Il a faim". Je venais juste de lui donner à manger. Elle m'a dit : "Gardez le contre vous. Ca va le calmer." Je l'ai serré contre moi. Il a hurlé pendant des minutes, des minutes et encore tout plein de minutes.
Les nuits suivantes n'ont pas été mieux. Sinon pires. Je ne comprenais pas. Pour la première fois de ma vie, je ne maîtrisais rien. Je ne savais pas comment calmer ce petit être tout rose que je n'arrivais toujours pas à appeler "mon ange".
J'ai voulu rentrer à la maison avant l'heure. J'ai supplié l'infirmière de me laisser partir. Ouf ! J'ai pu rentrer. En fait, je voulais juste pouvoir passer le relai au papa, pour souffler un peu.
Chez moi : SOS !
Mon fils pleurait beaucoup et dormait très peu. Pendant 3 mois, nous arrivions à dormir seulement 2 ou 3 heures par tranche de 24 heures. J'étais à bout, le papa aussi. Certaines personnes de mon entourage n'ont pas compris pourquoi je n'étais pas heureuse. Bah oui, une maman qui a un enfant en pleine santé, de quoi peut-elle se plaindre ???
Je suis devenue toute triste. Au fond de moi, je n'allais pas bien du tout. Mon fils mangeait, vomissait, hurlait... Les médecins se sont foutus de moi en disant que c'était mon 1er enfant, que c'était normal qu'il pleure, que c'était des coliques. Ils n'avaient que ça à la bouche : "COLIQUES". Moi, je savais bien que quelque chose n'était pas normal mais j'ai du me résoudre après avoir vu 4 ou 5 médecins différents. C'était surement moi qui n'était pas "normale"...
J'avais perdu le goût de vivre et je m'en voulais énormément d'être comme ça. Moi qui était avant hyper dynamique et souriante, je ne me reconnaissais plus. Je n'ai pas arrêté de penser que mon fils ne méritait pas une maman comme ça. Avec la fatigue, le stress et tout, j'ai même pensé que je devrais disparaître parce que j'était vraiment trop nulle...
Avec le papa, on ressemblait à deux zombies. On passait nos journées avec un nœud au ventre, tout le temps...
Puis mon fils a été chez la nounou. Et il l'a épuisé. Je n'osais même plus demander le soir en allant le chercher si la journée s'était bien passée. La réponse était toujours la même : "Il n'a pas dormi. Il a vomi. Il a beaucoup pleuré." La nounou avait de grosses cernes sous les yeux. J'ai pleuré. Je l'ai fait pleuré en pleurant. Bref, la totale
Je n'ai parlé de tout ça à personne parce que j'étais persuadée que personne ne comprendrait. J'ai gardé ça pour moi. Mes petits malheurs de maman au bout du rouleau : qui en aurait voulu ?
Un espoir ???
Un jour, j'ai changé de médecin et j'ai dit au nouveau qu'il y avait forcément un truc pas normal chez mon fils. Elle a d'abord parlé de coliques (tiens donc) et pour la 1ère fois en 5 mois, elle a prescrit des examens complémentaires, à savoir une fibroscopie.
On a donc débarqué aux urgences pédiatriques. J'ai posé le cosy devant le bureau de l'accueil. J'ai fondu en larmes. J'ai juste réussi à dire quelque chose comme "Faites quelque chose, je n'en peux plus.
Ils ont emmené mon fils passer l'examen. Je l'ai entendu hurler. Ca m'a fendu le coeur en milles morceaux mais dans un sens, je me disais qu'il fallait passer par là pour que tout s'arrange.
Finalement, il y avait bien quelque chose : une "béance du cardia" Le cardia est un petit muscle qui ferme l'oesophage. Ce n'est pas grave en soi mais en gros, tout ce que mon fils avalait remontait sous forme acide, d'où les hurlements et les vomissements depuis la naissance.
Il a eu un lait adapté et des médicaments. Et voilà, après 5 mois et demi, nous avons ENFIN pu revivre.
Et après ?
J'ai petit à petit repris goût à la vie et surtout j'ai appris à aimer mon fils ! ça paraît bête mais ça aura pris du temps, beaucoup de temps.
Je regrette aujourd'hui de ne pas en avoir parlé plus tôt à mon médecin. J'ai réussi à faire face toute seule mais j'en ai quand même bien souffert. Je me suis repliée sur moi comme un escargot dans sa coquille, ce qui n'était pas l'idéal pour apprendre à découvrir mon fils.
Quand mon fils a eu 2 ans, j'ai enfin réussi à en parler à mon médecin lors d'un banal rendez-vous. J'ai fondu en larmes mais ça m'a fait du bien. Pardon à ceux qui attendaient en salle d'attente ce jour-là, le rendez-vous a duré plus de temps que prévu...
Aujourd'hui, il m'arrive toujours d'avoir le coeur serré quand j'entend un bébé hurler comme le faisait mon fils. Je ne suis peut-être pas totalement guérie mais je suis au moins sortie de la dépression.
Avec le recul, je pense que j'ai un peu trop idéalisé le fait d'être maman. Je me voyais comme dans les films ou les bouquins pleins de mamans souriantes et épanouies, et de bébés joufflus super sages. Avec ses problèmes de santé, mon fils était en décalage avec tout ça. Un fossé s'est creusé petit à petit...
En bref...
Un baby-blues, c'est normal quand ça dure quelques jours, voire quelques semaines. Mais quand le mal-être s'installe vraiment, il ne faut pas hésiter à en parler. Il faut surtout s'enlever de l'esprit qu'on est nulle, qu'on n'y arrivera jamais Il faut aussi être solide dans son couple pour affronter cette épreuve (combien de fois ça nous a fait du bien de pleurer sur l'épaule de l'autre !)
Aujourd'hui, je sais que mon baby-blues s'était petit à petit transformé en dépression et je sais aussi que cela arrive à de nombreuses femmes.
Certains diront qu'il y a des épreuves bien plus dures dans la vie. C'est sûr.
Mais être maman, c'est tout de même pas rien. Parfois, on met du temps à le devenir. Mais après, comme on dit...ce n'est que du bonheur ! Mon fils va avoir 3 ans et je suis devenue une super maman !